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Le principe d’égalité de traitement vu par le juge

 

Le principe « travail égal, salaire égal » connait quelques aménagements ces derniers temps. Même si l’obligation d’égalité professionnelle homme/femme pèse sur l'employeur qui, en cas d’absence d’accord ou de plan d’action le prévoyant dans les entreprises d’au moins de 50 salariés, risque des pénalités financières, le juge semble lui donner plus de souplesse pour appliquer le principe « travail égal, salaire égal ».

 

Aux termes de l’article L 3221-2 du Code de travail « Tout employeur assure, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l'égalité de rémunération entre les femmes et les hommes. », ce qui signifie que les salariés placés dans une situation identique et effectuant un travail de valeur égale doivent être rémunérés de manière identique.

 

La Cour de cassation a même indiqué que « la seule différence de statut juridique » autrement dit agents de droit public et salariés, ne permet pas d’établir une différence de rémunération entre les intéressés qui effectuent le même travail, sauf si cette différence de rémunération résulte de l’application de règle de droit public. (Cass. Soc. 16 février 2012, n°10-21.864).

 

La Cour de cassation admet alors la différence de traitement si elle repose sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler la réalité et la pertinence. (Cass. Soc. 15 mai 2007, n°05-42.894).

 

Dix ans après, la Haute jurdiction fait valoir que « les différences de traitement entre des salariés appartenant à la même entreprise mais à des établissements distincts, opérées par voie d’accords d’entreprise négociés et signés par les organisations syndicales représentatives au sein de l’entreprise, investies de la défense des droits et intérêts des salariés de l’ensemble de cette entreprise et à l’habilitation desquelles ces derniers participent directement par leur vote, sont présumées justifiées de sorte qu’il appartient à celui qui les conteste de démontrer qu’elles sont étrangères à toute considération de nature professionnelle.. ». (Cass. Soc., 04 octobre 2017, n°16-17.517 et X 16-17.518).

 

En l’espèce, une société a fait l’objet d’une opération de fusion absorption. La société et les syndicats représentatifs signent un accord d’entreprise prévoyant les conditions de rémunération du travail de nuit, de dimanche et des jours fériés, issues des divers accords antérieurs à la fusion. Les salariés saisissent la juridiction prud’homale, soulevant le problème d’inégalité de traitement.

 

Le premier juge et la Cour d’appel accèdent à leur demande au motif que « l’accord d’entreprise « suite à fusion » motive le maintien des anciens accords par la volonté de la direction.. », qu’ « aucun nouvel accord d’établissement n’ayant été conclu concernant l’établissement concerné postérieurement à la fusion absorption d’une société distincte, de sorte que les anciens accords ne s’appliquaient qu’aux salariés transférés » et que « si le site en question est géré au niveau du groupe comme un établissement distincten maintenant les anciens accords, avant fusion, à l’ensemble des salariés travaillant sur le nouvel établissement », l’employeur a créé une disparité de traitement entre salariés et doit la réparer.

 

La Cour de cassation n’est pas de même avis. Elle casse l’arrêt de la cour d’appel en validant la différence de traitement entre les salariés des établissements distincts. (Cass. Soc., 04 octobre 2017, n°16-17.517 et X 16-17.518). 

 

Cette différence de traitement entre les salariés admis par le juge démontre que le salaire doit être individualisé et que les différents établissements peuvent pratiquer des avantages et salaires différents, à des conditions de les prévoir dans un accord collectif d’entreprise et de démontrer que ces différences reposent sur des raisons objectives. En cas de contentieux, la charge de preuve pèse sur le salarié. Comme c’est souvent le cas dans les contentieux prud’homaux, la preuve d’inégalité de traitement est entre les mains de l’employeur, il convient de demander au juge d’en ordonner la production.

 

 

Source : Cass. Soc., 04 octobre 2017, n°16-17.517 et 16-17.518.