De nouvelles dispositions dans la loi pour une immigration maîtrisée

 

Le 1ier août 2018, les députés viennent d’entériner de nouvelles dispositions concernant le droit d’asile et l’intégration des étrangers bénéficiant d’un titre de séjour. L’article 1er et 2 de la loi visent à renforcer la protection des personnes bénéficiant de la protection subsidiaire, de statut d’apatride ainsi que des membres de leur famille. Ainsi, de nouvelles cartes de séjour pluriannuelles de quatre ans sont crées au profit desdites personnes dès que leur statut fut reconnu. Quant aux membres de la famille d’un réfugié, ils peuvent prétendre à une carte de séjour même s’ils ne sont pas réguliers sur le territoire français.

 

L’article 8 de la loi vise à faciliter le fonctionnement de la Cour nationale du droit d’asile en créant la possibilité de communication audiovisuelle, alors que l’article 12 prévoit l’aménagement du caractère suspensif du recours contre la décision de rejet de la demande d’asile. Ainsi, le recours ne sera plus systématiquement suspensif pour les ressortissants des pays dits « surs » et pour les personnes qui présentent une menace pour l’ordre public. Néanmoins, il sera possible de demander la suspension de l’exécution de la décision dans le cadre du contentieux contre la mesure d’éloignement devant le tribunal administratif.

 

Une dérogation au principe du droit du sol est prévue à Mayotte pour un enfant né de parents étrangers. Ce dernier ne pourra acquérir la nationalité française à la majorité qu’à condition expresse que l’un de ses parents ait résidé en France de manière régulière et ininterrompu pendant plus de trois mois avant sa naissance, autrement dit qu’il dispose d’un titre de séjour.

 

Les procédures d’éloignement sont également dans le viseur du gouvernement. La nouvelle loi qui a porté la durée de la rétention administrative à quatre-vingt-dix jours au lieu et place de quarante-cinq, permet désormais d’exercer certains droits sur le lieu de la rétention administrative, ce qui n’était pas le cas jusqu’à présent. L’article 3 de la loi interdit de placer les mineurs étrangers isolés en rétention administrative, tout en autorisant la réunification familiale aux frères et sœurs des réfugiés mineurs. Cette mesure risque de faire exploser les demandes d’asile par les mineurs, même si aujourd’hui, peu de mineurs le sollicitent.

 

Par ailleurs, toujours dans l’esprit de sécurisation du droit au séjour, les articles 57 et 58 de la loi permettent de protéger les personnes, victimes de violences conjugales ou familiales, souvent réticentes pour dénoncer lesdites violences et dont la délivrance du titre de séjour dépend de la continuité de la vie commune. Une carte de résident est de droit en cas de condamnation de l’auteur des violences au pénal et une carte de séjour temporaire est délivrée pour les personnes ayant obtenu une ordonnance de protection provisoire.

 

Face au renforcement des droits, le législateur décide d’accroître l’intégration des étrangers en situation régulière. Les articles 48 et 49 de la loi parlent d’une « intégration réussie » tout en prévoyant une série d’actions permettant d’apprendre le français et de se former.

 

La loi renforce les mesures de contrôles et les sanctions tout en élargissant les possibilités de prononcer les peines d’interdiction du territoire français en raison des infractions délictuelles. Cependant, l’article 38 de la loi revoit le délit dit de « solidarité » en excluant des condamnations des personnes qui apportent une aide exclusivement humanitaire.

 

En ce sens, le 6 juillet 2018, le conseil constitutionnel a censuré le délit de solidarité aux motifs que la répression de toute aide apportée à la circulation de l’étranger en situation irrégulière ne respecte pas l’équilibre entre « principe de fraternité » et « sauvegarde de l’ordre public ». (Conseil constitutionnel, n°2018-717/718 QPC, 6 juillet 2018). Cependant, l’aide à l’entrée de séjour reste sanctionnée, aux termes de l’article L 662-1 du CESEDA qui dispose que « … toute personne qui aura, par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l'entrée, la circulation ou le séjour irréguliers, d'un étranger en France sera punie d'un emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 30 000 Euros. ».

 

L’article 35 de la loi rallonge la durée de la retenue administrative de 16 h à 24 heures permettant aux enquêteurs de procéder aux vérifications du droit au séjour en renforçant les sanctions pénales en cas de refus de prise d’empreinte digitale par l’intéressé. De même, les préfectures pourront solliciter des enquêtes administratives pour consulter les fichiers de renseignement lors de l’examen d’une demande de titre de séjour et l’OFPRA pourra refuser ou mettre fin au statut de réfugié en cas de condamnation pour des faits graves prononcés dans un autre pays européen.

 

Enfin, l’article 55 de la loi renforce la lutte contre les fraudes au séjour, les articles 30 bis et 30 ter visent à lutter contre les mariages frauduleux qui constituent selon le gouvernement un véritable détournement du droit au séjour.

Toutes ces dispositions entreront en vigueur dès que la loi soit publiée au journal officiel. Actuellement, le Conseil constitutionnel est saisi dans le cadre du contrôle de constitutionnalité à priori. Les députés estiment que la loi porte atteinte au respect des droits de la défense en raison de réduction des délais de traitement des demandes d’asiles et au « principe d’indivisibilité de la République » quant aux nouvelles conditions d’acquisition de la nationalité française à Mayotte.

 

 

Inna SHVEDA – Avocat 

 

Source : https://www.legifrance.gouv.fr

 

 

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